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12 septembre 2014

Fils des basses terres et des flots

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Mon grand-père maternel était marin. J'ai vu quelques photos de lui en costume blanc et d'autres, sérieuses, sur lesquelles il posait avec tout l'équipage. Il est allé en de nombreux endroits du globe avant et après la seconde guerre mondiale. Aux Etats Unis par exemple, d'où il a ramené un document officiel le décrivant comme "alien seaman". Une expression qui m'a toujours laissé rêveur. Mon grand-père était donc un "alien". Plus sérieusement, le mot désignait juste le fait qu'il était étranger à ces terres d'Amérique. Il est allé au Congo, également, duquel il a ramené des statuettes en ébène. J'ai conservé l'une d'entre elles, d'ailleurs. Je partage avec lui le goût de la mer, du vent du large et des vagues indomptables. Mais également la forme de mon nez qui permit à ma grand-mère de me reconnaître à coup sûr quand elle me vit la première fois, au jour de ma naissance, alors que j'étais en couveuse.

L'an passé, nous nous sommes rendus en Bretagne pour les vacances. Une fois sur place, je voulus absolument emprunter le bateau pour accoster sur une île pour le moins célèbre du Morbihan. A ma grande surprise, je découvris qu'une des pointes de cette île porte le même nom que ma mère. Et donc que mon grand-père. Je crus que ce n'était pas un hasard si je me trouvais là. Il fallait que je voie l'endroit. Après tout, peut-être la lignée paternelle de ma mère était-elle originaire de là. Pourquoi pas ? L'idée que les ancêtres de ma mère pussent plonger leurs racines sur cette île bretonne adorable m'enthousiasma vivement. Je n'avais jamais vu ce nom-là ailleurs. Nous louâmes aussitôt un vélo et parcourûmes les étroites ruelles fleuries du village. Bientôt, nous fûmes dans la campagne et débouchâmes sur un chemin impraticable à bicyclette. Un dolmen se dressait non loin de là. Le sentier qui conduisait à la pointe de l'île était désert, étroit, bordé de plantes sauvages. Enfin, nous atteignîmes le lieu qui, aujourd'hui encore, porte le nom de ma mère. La pointe descend vers le Golfe du Morbihan, hérissée de genêts et de fougères.  Elle est battue par le vent et respire la tranquillité. Un dolmen à moitié effondré se dresse là, gardien des temps et de mystères lointains. Le cri d'un animal me parvint du milieu des herbes. Mais je ne parvins pas à l'identifier, c'était la première fois que je l'entendais. Les paroles d'une chanson me revinrent en mémoire "la voilà, la blanche hermine. Vive la mouette et l'ajonc. La voilà, la blanche hermine, vivent fougères et buissons". Assurément, tous étaient là. Fougères, ajoncs, mouettes et buissons.  Emu, je tentai de m'enraciner, de me reconnecter à cette terre mère. J'avais envie de m'enfoncer dedans mais la végétation était inextricable. La course à travers l'île nous avait assoiffés. Je bus et je mangeai une pomme. Je regardai alors le trognon que j'avais rongé...et si ? Et pourquoi pas ? Je m'abaissai et décider de confier les pépins de pomme à cette terre-mère. En guise d'offrande aux probables ancêtres de ma mère. Qui sait ? Peut-être qu'aujourd'hui la jeune pousse d'un pommier se fraie-t-elle un chemin à travers les genêts.

Le lendemain, je recherchai une librairie bretonne, la trouvai et saisis un dictionnaire français-breton. J'en parcourus les pages avec fièvre. Je voulais découvrir le sens du nom de ma mère. Quel serait-il ? Pendant ces quelques minutes-là, tout était encore possible. Il pouvait signifier "terre venteuse" ou "fiers genêts" ou encore "gardien de la mer". Enfin, la traduction m'apparut. Le nom veut dire "nos flots". Nos flots ! Ou, plus vraisemblablement, "nous les flots". Un nom qui, s'il l'avait connu, aurait très certainement ému mon grand-père marin. Il n'y a pas de hasard. Le nom est, bien sûr, associé à l'île et aux vagues qui la frappent. Mais l'île n'en fut pas toujours une. Sans quoi on ne pourrait expliquer la profusion de dolmens présents là. Je l'avais déjà remarqué en Irlande, il est assez fréquent de rencontrer des tumulus sur des collines. En une époque lointaine, l'île était d'ailleurs probablement une colline entourée de plaines. Ces plaines furent envahies ensuite par la mer toute proche lors de la formation du Golfe. Et la colline, du même coup, devint île. Le dolmen qui se trouve à la pointe de l'île est aujourd'hui à moitié effondré et enseveli par la végétation. Mais un autre dolmen se dresse toujours, plus à l'intérieur des terres. Il comporte, lui, des pictogrammes dont il parait qu'ils représentent la Déesse Mère.

Le nom de mon père indique, lui, qu'il venait des basses terres. Probablement des Pays Bas où il arrive que les terres soient plus basses que la mer. Le nom de ma mère, lui, signifie "nos flots". Tel je suis donc, mariage de ces deux noms. Rien ne me rend plus heureux que de marcher sur une plage, à la lisière des vagues. Avec les pieds qui s'enfoncent dans le sable et laissent des trouées aussitôt envahies par la mer. Je suis ce sable là. Mouvant. Gonflé d'eau. Je suis fils des basses terres... et des flots.

Le dolmen effondré de la pointe de l'île

Fougères et ajoncs

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