Le calice fontaine - l'Hydrangea

Plusieurs plants d'Hydrangea parsèment notre jardin. En été, ils se couvrent de boules florales rosées. Celles-ci persistent longtemps, jusqu'en automne. Puis les pétales brunissent et changent de texture. En hiver, les boules de fleurs séchées, de couleur beige, continuent de couvrir l'Hydrangea. Il est d'usage alors de les couper avant que la sève ne remonte. Cela permet à la plante de fleurir à nouveau, l'été suivant. Les feuilles, elles, ont tendance à s'ouvrir dès la fin de l'hiver. Certains ajoutent du cuivre au pied pour que le rose des fleurs devienne bleuté. Ce peut être joli mais ce n'est pas le style de la maison.

Le nom même de la plante, Hydrangea, me suggère l'idée d'"ange de l'eau", "ange aquatique", voire d'"eau angélique", et, pourquoi pas, d"ondine". Il semblerait toutefois que l'étymologie du mot soit plutôt "aggos". L'Hydrangea est donc le porteur d'eau, le verre d'eau. Son rapport à l'eau se traduit jusque dans les usages. Ainsi, chez les Cherokees, on administrait de l'Hydrangea pour favoriser l'excrétion urinaire, pour éliminer les toxines. L'Hydrangea porte l'eau qui nettoie. C'est le verseur d'eau, l'arroseur, il vous lave de vos scories. En anglais, on le surnomme "seven barks". Sept écorces. La plante a en effet tendance à perdre des lamelles d'écorces de manière régulière. Elle mue comme un serpent. Elle se nettoie de ses scories, de ses anciennes peaux, de ses lambeaux devenus inutiles. L'écorce se régénère sans cesse. On peut sans doute y voir une métaphore de l'eau qui lave, purifie, ôte vieilles peaux et gangues, élimine les souvenirs inutiles et les émotions destructrices.

La fleur de l'Hydrangea comporte 4 pétales arrondis qui suggèrent l'idée d'équilibre mais aussi d'arrondir les angles. L'émotion contenue pourrit. La libérer est nécessaire. Mais la plante invite à le faire dans un souci d'équilibre, avec dignité. Elle n'apprécie ni la contrainte, ni la violence. Ses bourgeons floraux ne résistent d'ailleurs pas aux fortes chaleurs. On raconte qu'un empereur japonais aurait offert, jadis, un bouquet d'hydrangea à la famille d'une demoiselle dont il était maladroitement amoureux et qu'il avait froissée. Il le leur offrit en guise d'excuses. Pour certains, l'Hydrangea représente la fierté, la vanité. Offrir un bouquet d'hydrangea revient à se montrer plus humble. On reconnaît en fait que l'autre aussi a des raisons d'être fier. L'imagerie du porteur d'eau, de la beauté, de la fierté, évoque d'une certaine manière un verre soigneusement travaillé, ciselé, magnifié. Un verre qui embellit ce qu'il contient dans un jeu délicat de transparence et d'opacité. Il garde le secret de son contenu mais à moitié. Il contient l'émotion tout en la révélant. Il permet à celle-ci de s'exprimer dans la dignitié et la finesse.

Je suis d'avis que la boule florale de l'Hydrangea peut parfaitement servir à représenter la planète, le globe terrestre. Après tout, la Terre n'est-elle pas surtout constituée d'eau en sa surface ? Cette imagerie est très utile quand il s'agit de procéder à certains travaux de méditation. Par exemple quand on visualise que la Terre se nettoie de ses scories, des formes pensées devenues inutiles, de la pollution qui l'accable. Je place ainsi une boule de fleurs d'hydrangea dans un vase en verre soigneusement ciselé. Je visualise alors notre Terre superposée à elle et j'imagine celle-ci devenir plus belle, plus propre, plus lumineuse. Je visualise également la pluie, la douche, la fontaine, tout ce qui purifie.

Quand on veut se dépolluer soi-même, on peut prendre quelques fleurs d'Hydrangea et les laisser infuser dans de l'alcool pendant un cycle lunaire. Ensuite, on en prélève quelques gouttes que l'on verse sur un papier sur lequel on a écrit les émotions destructrices dont on veut se débarasser. On peut alors le confier à la pluie ou le placer dans un bol chantant. Si on utilise le bol chantant, on tourne autour de lui avec le maillet adéquat afin d'y faire jaillir une fontaine. On répète alors d'abord le nom de l'émotion dont on veut se débarasser en se souvenant des événements néfastes qu'elle a déjà causés.Puis, on la transforme en son contraire, tout en imaginant les situations bénéfiques que cette autre émotion pourrait engendrer.