La Coquine - La Menthe

Les tièdes soirées d'été, cela se sirote lentement. Très lentement. Comme une bonne infusion de menthe. Sucrée. Arrosée de fleurs d'oranger. La Menthe est une de mes amies. J'aime la sentir. J'aime la toucher. J'aime regarder ses courbes buissonnantes. Elle pousse sous de multiples formes dans mon jardin, avec la Sauge, le Thym et l'Estragon. Menthe chocolat. Menthe Poivrée. Menthe marocaine. Elles sont là, foisonnantes. J'aime leur fraîcheur. Elle m'apportent la lumière de l'hiver, en plein coeur de l'été.

Un jour, j'ai bien sûr essayer de contacter l'esprit de la Menthe. Mais elle se déroba. J'essayai alors le pendule. Celui-ci, par contre, réagit aussitôt. Et il me désigna un nom. PHOEBE.  Je m'y connais peu en déesses, je le confesse. Je surfai donc avec excitation. Qui est PHOEBE ? A part une fille de "Friends" ou de "Charmed", je veux dire ? Wikipédia m'informa qu'elle est fille d'Ouranos et de Gaia. Plus précisément, on la surnomme "celle qui éclaire" ou encore "la brillante". Elle illumine les humains arrêtés aux carrefours de leur vie. Elle les aide à choisir. C'est une lumière suspendue dans la nuit. La Menthe serait-elle "réellement" cette lueur de l'hiver, éclose au beau milieu des touffeurs moites des jours d'été ?

J'allai plus loin. Ainsi je découvris, chez les Grecs, une histoire surprenante.  Minthe (dont provient le mot "menthe") était une nymphe. Celle-ci avait séduit Hadès, dieu des enfers. Je ne vous ferai pas l'injure de vous rappeler que celui-ci était déjà pacsé avec Perséphone. Apparemment, cette dernière n'était pas du style à pleurer son sort. Elle aurait pu, notez bien, se crêper le chignon avec Minthe ou la couvrir d'injures, voire jeter un autre dieu dans ses bras, histoire de la distraire. Mais Perséphone avait des griffes et un tempérament de feu. Elle préféra donc, purement et simplement, liquider sa rivale. Elle la tua. Comme je vous le dis. Elle n'aurait, j'imagine, aucune peine à plaider le crime passionnel... Evidemment, vous connaissez les hommes. Hadès pleura sa maîtresse bien-aimée. Elle devait baiser comme une folle. Alors, il conjura la mort. Après tout, la mort, c'est un peu son truc à lui, quelque part ! Il transforma donc Minthe en  plante sauvage, ainsi elle ne serait pas tout à fait morte. J'ai déjà remarqué que les dieux grecs adorent ce genre de choses. C'est ainsi qu'apparut la Menthe. La Menthe est donc bien... l'amante, oui, il n'y a pas de hasard. Son parfum est intense. Car Minthe était du genre chaudasse, elle n'allait tout de même pas se contenter d'un parfum ridicule. C'est ainsi que la Menthe est devenue en fait la plante de la passion amoureuse. La reine des philtres d'amour, des nuits de braise et des parties de jambes en l'air. Je me suis laissé dire que les maris conduisaient, autrefois, leur matronne à Vénus afin de réveiller leurs ardeurs érotiques. Pour cela, ils déposaient des feuilles de menthe à la déesse. Et celle-ci, en retour, leur apportait de folles extases nocturnes. Ils lui amenaient une bobonne fatiguée, préférant comater devant "plus belle la vie". Elle leur rendait, pour un bouquet de menthes, une nymphe aussi chaude qu'une baraque à frites. Ca laisse rêveur, non ?

 La Menthe, si elle inspire la passion amoureuse, sert toutefois également au bannissement. Cela aussi, ça se comprend. Minthe a quand même subi la rouge colère de Perséphone. C'est pourquoi on utilise quelques fois la menthe pour se débarrasser des indésirables. Des épouses légitimes, par exemple, je suppose... Ou des maris qui préfèrent passer leur soirée au cul de la bouteille plutôt qu'à celui de... Mais je m'égare...

Donc, je disais que le pendule m'avait montré Phoebe comme étant proche de l'esprit de la Menthe. Phoebe, qui éclaire celui qui doit choisir. Cela me fait penser, vous vous en doutez, à une carte du tarot : "L'Amoureux". Sur cette carte, le personnage se trouve à la croisée d’un chemin, où il faut qu’il choisisse. Il se trouve à un moment de sa vie où il questionne et a besoin de réponses. Le plus souvent, il doit choisir entre le risque de l’inconnu et la sécurité d’une existence devenue insipide. Entre une femme légitime et une maîtresse affriolante. Hmm. Oui, tout cela a du sens. La Menthe, comme une lune d'hiver, écrivais-je tout-à-l'heure. Elle seule sait ce qui se trouve tout au bout de la nuit.